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Saint Joseph, époux de Marie, et la France

- Catégories : Histoire religieuse , Saint Joseph

Statue de saint Joseph à l'Abbaye

Gerson et saint Joseph

Juillet 1413. Paris est à feu et à sang, aux jours les plus tourmentés de la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons. L’Eglise elle-même est déchirée par le Grand schisme d’Occident, avec deux anti-papes concurrents du Pontife légitime. Le théologien Jean Gerson propose en vue l’unité de l’Eglise et du royaume l’instauration d’une fête en l’honneur de saint Joseph. Gerson est alors la figure de proue en France d’une dévotion initiée principalement par les prédications de saint Bernard au XIIe s, et fortifiée par l’apport de l’Orient via les croisés. Au concile de Constance en 1416, le français exhorte dans le même sens les Pères conciliaires lors d’un sermon pour la fête de la Nativité de la Vierge, vantant « l’intercession d’un Patron si puissant, lequel exerce une sorte d’empire sur le cœur de son épouse.  » Le Concile met fin au schisme en 1418, mais il faudra attendre Sixte IV en 1481 pour l’extension à l’Eglise universelle de la fête de saint Joseph.

Saint Joseph et l'Enfant-Jésus

Saint Joseph au coeur du renouveau religieux du XVIIe

C’est toutefois au XVIIe siècle que se répand le plus la dévotion au saint patriarche en France.  Pas un institut religieux ne se fonde sans sa protection  : les Filles de la Charité, les Eudistes, le séminaire Saint-Sulpice, celui les Missions étrangères, etc. L’implantation en France du Carmel déchaussé par Madame Acarie et le Cardinal de Bérulle amplifie le mouvement. Saint François de Sales en est également un grand propagateur. Les missionnaires l’exportent au Canada, qui se place sous le patronat de saint Joseph dès 1624. Le germe était semé qui s’épanouira avec la basilique Saint-Joseph du Mont Royal érigée au XXe s. grâce au saint Frère André.

Saint Joseph, Louis XIV et Cotignac

Le 21 février 1660, Louis XIV se rend avec sa mère au sanctuaire de Notre-Dame de Grâces à Cotignac, en pèlerinage d’action de grâce pour sa naissance. La grossesse inespérée d’Anne d’Autriche en 1638 avait suscité la consécration de la France à Notre-Dame par Louis XIII. Quelques mois plus tard, le 7 juin, un jeune berger de 22 ans fait paître son troupeau à proximité, sur les hauteurs arides du Bessillon. C’est le milieu du jour, le soleil est accablant. Gaspard Ricard est assoiffé.  Il voit soudain un homme d’imposante stature qui lui indique un rocher  et lui dit : «  Iéu siéu Joùsè; enlevo-lou e béuras. Je suis Joseph  ; enlève-le et tu boiras.  » Gaspard hésite, mais saint Joseph réitère son ordre. Le berger obéit, déplace l’imposant rocher le plus facilement du monde, et découvre une eau fraîche qui commence à ruisseler. Il boit avec avidité, puis s’aperçoit que le mystérieux personnage a disparu. Laissant là son troupeau, Gaspard court au village. On vient en hâte pour constater qu’en ce lieu le moins propice s’écoule maintenant une eau abondante. Le même jour, Louis XIV (qui sera frappé de la coïncidence) accueillait en son royaume l’infante Marie-Thérèse, fille de Philippe IV. L’année suivante, un des premiers actes du gouvernement personnel du jeune roi après la mort de Mazarin est de consacrer le royaume au chef de la Sainte Famille, le 19 mars 1661.

Saint Joseph aux colombes

Un certain oubli de saint Joseph mais pas par tous...

Un relatif refroidissement de la dévotion au XVIIIe s. prélude sans doute à la tragique fracture religieuse et politique de la Révolution française, que l’Empire et la République exporteront au XIXe s. en Europe et dans le monde. Cependant, une après-midi de mars 1873 à Alençon, un nourrisson retombe comme mort sur le sein de sa nourrice. Le matin, la maman angoissée, sainte Zélie Martin, s’était jetée aux pieds de saint Joseph pour le supplier de guérir sa petite Thérèse. Après la terrible alerte, l’enfant ouvre enfin les yeux et se met à sourire. Saint Joseph avait sauvé celle que l’Eglise proclamera patronne de la France et des missions.

Saint Joseph, toujours présent au XX. s.

Saint Joseph de Bon Espoir à Espaly

Saint-Joseph-de-Bon-Espoir à Espaly (source : wikipedia)

La statue monumentale de Saint-Joseph-de-Bon-Espoir à Espaly, érigée au début du XXe s., demeure l’emblème de ce lien privilégié entre saint Joseph et la France. Plus récemment, le pèlerinage des pères de famille - initié à Cotignac en 1978 et reproduit depuis dans d’autres sanctuaires - connaît un succès croissant et témoigne de l’assistance silencieuse et efficace de saint Joseph auprès des familles.

La consécration par Louis XIV avait été préparée par l'éloquence de Bossuet dans un sermon de 1659, où il proposait en modèle de pureté, de simplicité et de fidélité, celui en qui Dieu a formé lui-même un cœur paternel.  Et le 19 mars 1661, il insistait sur son détachement et son amour de la vie cachée. Qui pourra nier que notre pays aujourd’hui a plus que jamais besoin de ce modèle ? Saint joseph n’a pas oublié la consécration qui lui fut faite et veut nous délivrer de l’emprise tyrannique d’une société corrompue, hédoniste et hypermédiatisée. Par lui s’imprimera de nouveau et plus profondément en l’âme de la France la ressemblance du Christ, pour qu’elle la communique au monde. Grâce à lui, ceux qui sont assoiffés ne craindront pas de soulever les pierres qui obstruent la source d’eau vive, tandis que retentit encore l’appel de saint Jean-Paul II : « France, fille aînée de l’Eglise, es-tu fidèle aux promesses de ton baptême ? »

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